Les 5 clés du bonheur selon Tal Ben Shahar

La recherche du bonheur est paradoxale : si nous le cherchons directement, par exemple en nous donnant comme objectif d’être heureux ce jour, nous n’y arriverons pas, ne serait-ce que parce que nous ne maitrisons ni nos émotions ni les évènements qui risquent de les affecter. La seule manière de l’atteindre est de le chercher indirectement, en se centrant sur les 5 éléments qui le composent.[1]

Ces 5 éléments forment l’acronyme SPIRE :

  • Spirituel : avons-nous un sens, un but dans notre vie et sommes-nous complétement présents à ce que nous vivons ?
  • Physique : prenons-nous soin de notre corps ? Compte tenu de l’importance des interactions entre notre corps et notre esprit, c’est essentiel : en traitant notre corps avec bienveillance et en mangeant sainement, nous nourrissons notre bien-être physiologique et psychologique ;
  • Intellectuel : sommes-nous curieux et essayons-nous d’apprendre constamment de nouvelles choses ? Les recherches montrent que les personnes curieuses sont en général plus heureuses et vivent plus longtemps ;
  • Relationnel : cultivons-nous des relations qui nous font du bien ? Le premier indicateur du bonheur est la qualité du temps que nous passons avec les personnes qui comptent pour nous et pour qui  nous comptons ;
  • Emotionnel : comment accueillons-nous nos émotions ? Savons-nous accepter leur changement permanent, nous ouvrir à celles qui sont désagréables et cultiver celles qui sont agréables ?

Le bien-être financier ne figure pas dans cette liste parce que, à partir du moment où nos besoins élémentaires sont comblés, avoir plus d’argent ne nous rend pas heureux. C’est alors l’usage que nous faisons de notre argent qui joue sur notre bonheur : par exemple l’utiliser pour vivre des expériences agréables nous rend plus heureux que d’acheter des objets. De même, le fait d’en donner pour aider les autres contribue beaucoup à notre bonheur.

Une des étapes clés pour accroitre notre niveau de bonheur est de prendre conscience que nous en avons le pouvoir. Quels que soient les évènements que nous vivons, nous avons la possibilité d’agir pour les vivre de manière moins douloureuse et plus heureuse. Ce sera la démonstration du livre.

Le bien-être spirituel

La spiritualité dans le sens que lui donne Tal Ben Shahar comporte deux dimensions :

  • Avoir le sentiment que nos actes ont un sens et un but ; il ne s’agit pas de trouver le sens de la vie, qui relève d’un questionnement existentiel, philosophique ou religieux, mais de trouver un sens à la vie, dans nos relations et nos actions au quotidien.
  • Être pleinement conscients du moment présent.

Quelles que soient nos activités personnelles ou professionnelles, nous avons un certain contrôle sur le sens que nous leur donnons. Donner à une activité un sens plus important que le simple fait de la réaliser, sans avoir de choix, nous permet d’en tirer beaucoup plus de satisfaction et de mieux vivre les inévitables difficultés.

C’est ce qu’illustre l’anecdote des 3 tailleurs de pierre au Moyen-Âge, à qui quelqu’un demande ce qu’ils font :

  • Je taille des pierres, dit le premier ;
  • Je travaille pour nourrir ma famille, dit le second ;
  • Je bâtis une cathédrale, dit le troisième ;

Ou ce que dit un cardiologue spécialisé dans le changement des piles des stimulateurs cardiaques : certains jours j’ai l’impression de me limiter à changer des piles, d’autres jours je sauve des vies.

Ou encore des démarcheurs téléphoniques chargés de récolter des fonds pour les programmes sociaux d’une université américaine : ceux qui ont passé du temps avec des étudiants boursiers qui leur ont expliqué comment cette bourse avait changé leur vie en leur permettant de faire des études ont ensuite eu de biens meilleurs résultats que leurs collègues, car leur – difficile – travail avait pris pour eux un sens beaucoup plus important et concret, ce qui les avait rendus plus motivés et plus convaincants dans leurs conversations.

Une autre manière de vivre la spiritualité est de pratiquer la méditation de pleine conscience, pour nous entrainer à être conscients de l’instant présent, sans jugement sur ce que nous vivons. De très nombreuses études ont montré que cette pratique a des effets positifs très forts pour améliorer notre santé physique et psychologique. Une des raisons est qu’elle nous aide à prendre conscience des moments de plénitude disséminés dans notre vie et à savoir les apprécier. Ce sont aussi ces moments qui nous permettent de mieux affronter les difficultés lorsqu’elles surviennent.

Le bien-être physique

La première étape pour atteindre notre potentiel de bien-être physique est de prendre conscience du lien indéfectible qui existe entre le corps et l’esprit.

Une des principales difficultés pour de nombreuses personnes aujourd’hui est le stress. En réalité, le problème n’est pas tant dans le stress lui-même que dans l’absence de récupération. Les êtres humains ont toujours été soumis à des grands stress, depuis la peur des prédateurs pour les hommes préhistoriques à celle de la maladie, des guerres et des famines par la suite. La différence pour nous c’est que nous manquons de temps de repos et de possibilités de récupérer, ce qui très nocif pour nous, physiologiquement et psychologiquement.

Nous avons besoin de trois niveaux de récupération : micro, moyen et macro.

  • La micro-récupération consiste à prendre des instants de repos très courts dans notre journée – sans téléphone, mails ou autres distractions. Même quelques minutes seulement entre deux activités permettent déjà de retrouver de la sérénité et de l’énergie. Au minimum, quelques secondes de respiration lente et profonde avant un moment difficile permettent de l’aborder de manière plus paisible.
  • La récupération moyenne consiste à prendre un jour de repos de temps en temps et de faire une – ou mieux plusieurs – bonnes nuits de sommeil. Et si vous vous sentez coupables de ce temps « inutile », sachez que ceux qui le prennent sont ensuite plus productifs et plus créatifs dans leurs activités.
  • La macro-récupération est atteinte lorsque nous prenons plusieurs jours de suite qui sortent de notre routine et de notre stress quotidiens. Cela implique de couper complétement par rapport à notre travail. Là aussi, si vous avez du mal à le faire, sachez que vous serez plus efficace une fois de retour à votre poste.

Une bonne manière de récupérer est aussi de consacrer certains moments de sa journée à ne faire qu’une seule chose à la fois. Une autre est de faire de l’exercice physique, à dose et à rythme adaptés à votre condition de santé. L’essentiel est la régularité : trois séances par semaine, même courtes, sont bien plus efficaces qu’un seul entrainement intense le dimanche. De même, coupez vos journées de travail avec quelques minutes de mouvements toutes les deux heures, votre corps et votre esprit vous en seront reconnaissants.

Le bien-être intellectuel

  • Nourrir votre curiosité innée, votre désir naturel d’apprendre toujours plus. Si vous avez le sentiment de l’avoir perdu, retrouvez-le en vous posant de nouvelles questions, toujours formulées de manière positive, par exemple : quand est-ce que je me sens le plus heureux ? Comment renforcer ces moments ? Qu’est-ce que j’aime apprendre ? Qu’est-ce qui fonctionne bien dans mes relations avec les autres ? Comment mettre plus de joie dans ma vie ?
  • Creuser certains sujets, pour le plaisir et pour entrainer notre cerveau à approfondir sa réflexion. Cela nous donnera des capacités qui seront utiles dans le reste de nos journées, en particulier pour mieux comprendre les autres et la manière d’interagir avec eux. Cela  nous aidera aussi à savoir sélectionner dans le flux gigantesque d’informations que nous recevons chaque jour, dans lequel nous pouvons facilement nous noyer.
  • Être ouvert à la possibilité de faire plus d’erreurs car c’est en les acceptant que nous pouvons progresser. L’échec est essentiel à l’apprentissage et au développement. Imaginez des parents bien intentionnés qui voudraient éviter à leur bébé de tomber : il n’apprendrait jamais à marcher. Cela nous demande de nous pardonner nos imperfections et de nous aimer avec toutes nos limitations. Au plan collectif, cela demande de créer un climat de sécurité psychologique, dans lequel l’erreur est acceptée, car c’est la condition indispensable pour pouvoir oser innover. Tal Ben Shahar cite une étude réalisée par Google qui a constaté que ses équipes les plus performantes étaient celles qui bénéficiaient d’un niveau de sécurité psychologique élevé. Elles avaient le sentiment d’avoir le droit d’échouer et donc la possibilité d’expérimenter et d’innover.

Le bien-être relationnel

D’après une étude réalisée par l’université d’Harvard sur près d’un siècle, le meilleur indicateur du bonheur est la qualité de nos relations humaines, et plus précisément la quantité et la qualité des relations intimes sources de soutien. Ce sont elles qui rendent nos bonnes périodes encore meilleures et nous permettent de tenir le coup dans les tempêtes.

La même étude a montré que le meilleur indicateur d’une bonne santé est également la qualité de nos relations humaines.

Les liens intimes sont donc le premier indicateur de bonheur et de santé. Cela est confirmé, en creux, par les études qui montrent que la solitude est un facteur très important de mauvaise santé physique et psychologique.

Dans un monde qui s’attacherait à développer non plus la richesse matérielle mais le bonheur véritable, une des règles les plus importantes serait de prendre régulièrement le temps d’avoir des conversations profondes et sincères avec nos proches.

Pour améliorer la qualité de nos relations, nous avons besoin de :

  • Développer notre empathie, en essayant de comprendre le point de vue et le ressenti de l’autre.
  • Être généreux. Là encore des études ont montré que le fait de donner aux autres renforçait le niveau de bonheur et la confiance en soi. Et ce n’est pas une question d’argent : comme le disait Anne Franck – à 13 ans et cachée dans son grenier – on peut toujours donner, au moins de la gentillesse.
  • Prendre soin de nous-même. Si nous ne voulons pas nous épuiser, nous devons aussi veiller à recharger nos propres batteries. Tal Ben Shahar propose le concept d’égo-altruisme : prendre soin des autres et de soi-même.

Le bien-être émotionnel

Pour vivre dans ce bien-être émotionnel, nous devons nous accorder le droit de ressentir des émotions désagréables et douloureuses et les accueillir sans nous juger et sans chercher à les refouler. Seules deux catégories de personnes ne ressentent jamais ce type d’émotions : les psychopathes et les personnes décédées …  Se donner la permission d’être humain, c’est s’accorder l’autorisation de ressentir toutes les émotions existantes, aussi douloureuses soient-elles.

Rejeter les émotions les renforce alors que les accepter leur permet de diminuer progressivement en intensité. En outre, se couper de ses émotions douloureuses nous empêche de ressentir pleinement celles qui sont agréables. Enfin, combattre une émotion rajoute une nouvelle couche de souffrance puisque nous nous jugeons et nous sentons coupables de ce que nous ressentons.

Lorsque vous ressentez des émotions douloureuses, il existe trois manières de vous donner l’autorisation d’être humain :

  • Pleurer. Cela nous apaise en libérant dans notre corps des hormones et des substances qui soulagent la tristesse et le stress.
  • Parler de ses émotions douloureuses à une personne qui saura vous écouter sans vous juger.
  • Ecrire à propos de vos émotions. Prenez ne serait-ce que dix minutes par jour pour écrire dans un journal intime les difficultés que vous rencontrez et votre ressenti.

Nous gagnons à observer nos émotions avec bienveillance et curiosité, en prenant conscience qu’elles ne nous définissent pas. Il peut sembler artificiel d’apprendre à ne plus dire « je suis triste, je suis en colère, j’ai peur », mais « je ressens de la tristesse, de la colère, de la peur », mais cela nous aide à nous en décoller pour ne plus nous sentir envahis et prisonniers de ces ressentis. En outre, cela correspond à une réalité profonde : nous ne sommes pas nos émotions, qui changent en permanence.

Cultiver la gratitude nous aide aussi à maintenir un bon équilibre émotionnel. En effet, cela nous permet de voir des éléments positifs qui risquent de passer inaperçus si nous nous focalisons sur les difficultés. Tenir un journal de gratitude, écrire une lettre de gratitude aux personnes qui nous ont fait du bien -même si nous ne l’envoyons pas – sont des outils qui permettent de renforcer notre gratitude pour les bons côtés de notre vie – sans chercher à masquer ceux qui sont difficiles.

Apprendre à savourer les bons moments que nous avons vécus, en y repensant volontairement et en faisant remonter les émotions agréables que nous avons ressenties est aussi un moyen efficace d’augmenter notre bien-être émotionnel.

Conclusion : passer à l’acte pour avancer

Les meilleures lectures, les stages les plus extraordinaires, les rencontres les plus bouleversantes ne durent que le temps d’un feu de paille. Pour introduire de réels changements, il faut passer à l’action, expérimenter, faire des essais.

En reprenant chacun des 5 éléments de ce livre, demandez-vous : que puis-je faire différemment, qui m’aidera à être plus heureux quels que soient les évènements ?

  • Bien-être spirituel : comment insuffler plus de sens à mes activités quotidiennes ? Comment être plus attentif et présent à ce que je vis ici et maintenant ?
  • Bien-être physique : comment introduire plus de récupérations (micro, moyenne et macro) dans ma vie ? Comment me mettre ou continuer à faire de l’exercice physique régulièrement ?
  • Bien-être intellectuel : comment puis-je développer ma curiosité ? Quel sujet ai-je envie d’approfondir ?
  • Bien-être relationnel : comment puis-je encore améliorer la qualité de mes relations intimes ? Comment davantage m’ouvrir aux autres et être plus généreux ?
  • Bien-être émotionnel : comment me donner plus la permission d’être humain et mieux accueillir mes émotions douloureuses, sans m’identifier à elles ? Comment développer la gratitude ?

Chacun de ces éléments a des répercussions sur les autres : en introduisant un changement sur un point, vous allez aussi améliorer les autres. Cela vous rendra plus heureux, plus optimiste et vous donnera plus d’espoir pour l’avenir et d’énergie pour le construire.

Enfin, souvenez-vous que le bonheur est contagieux : en cherchant à être plus heureux, vous contribuez aussi à construire un monde meilleur.



[1] Cet article n’est pas un résumé exhaustif, mais comporte les extraits qui m’ont paru les plus significatifs du livre « Les 5 clés du bonheur » de Tal Ben-Shahar, dans l’espoir de vous donner envie de lire l’ouvrage en lui-même, (éditions Robert Laffont, 2021). Ancien professeur à Harvard, Tal Ben Shahar est aujourd’hui conférencier international.

[2] Chaque affirmation de ce livre s’appuie sur des études scientifiques validées. Les références figurent dans les notes de l’ouvrage si vous souhaitez les consulter.

Faites-vous un vrai cadeau : osez l’autocompassion

Narcissisme ? Complaisance envers soi ? Moyen de fuir ses responsabilités ? L’autocompassion n’est rien de tout cela. Au contraire, en nous aidant à poser un regard bienveillant sur nous-mêmes, avec nos limites et nos insuccès, elle nous aide à :

  • Mieux assumer ce que nous sommes et le résultat de nos actions.
  • Agir de manière plus authentique, avec nous-mêmes et avec les autres.
  • Être plus motivés pour atteindre nos objectifs et persévérer malgré les difficultés.

L’autocompassion repose sur deux constats universels :

  • Nous avons une relation avec nous-mêmes : nous nous regardons, nous nous parlons, nous interrogeons et nous répondons et nous nous jugeons en permanence, tour à tour positivement ou négativement et, parfois, très négativement.
  • Nous vivons nécessairement des périodes de souffrance car tout change au bout d’un certain temps, en nous et dans ce qui nous entoure : ce qui répond à nos besoins et nous rend heureux pendant une période plus ou moins longue ne nous satisfait plus ou vient à disparaitre.

L’autocompassion c’est quoi ?

C’est la capacité à :

  • Accueillir, reconnaitre et s’exposer à nos difficultés et notre souffrance.
  • Avec une attitude de considération, de bienveillance et de gratitude envers nous-mêmes.

Dit autrement, l’autocompassion est la volonté de considérer nos erreurs et insuffisances avec douceur et compréhension, en acceptant que se tromper est le lot de tous les êtres humains, nous inclus.

Elle comporte trois dimensions :

  • S’ouvrir à l’expérience douloureuse, sans s’identifier à elle.
  • Ne pas se juger et se condamner, mais se regarder avec compréhension, douceur et soutien.
  • Ne pas s’isoler et se croire seul à vivre cette difficulté, mais prendre conscience que nos imperfections sont constitutives de notre humanité et s’ouvrir à ce sentiment d’humanité commune.

L’autocompassion ce n’est pas …

Le mot autocompassion suscite souvent des réactions négatives, de rejet ou même de colère, car nous pensons à tort qu’elle se confond avec l’auto-apitoiement, la faiblesse, l’égoïsme, la victimisation et le mensonge et qu’elle conduit nécessairement à rester inactif et ne rien exiger de soi.

En réalité, les études menées sur des personnes ayant intégré l’autocompassion dans leur vie quotidienne montrent que celles-ci :

  • Sont plus entreprenantes car elles ont moins peur d’échouer et ont tendance à persévérer davantage après un échec. En effet nous acceptons mieux les inévitables déconvenues et impasses sur notre route vers nos objectifs, ce qui nous aide à nous remettre en route. L’autocompassion nous aide même à accepter la responsabilité de nos actions et de leurs résultats, puisque nous n’avons pas une image de perfection à préserver à nos yeux et à ceux des autres. Elle aide également à se donner des objectifs ambitieux car nous vivons mieux les inévitables hauts et bas sur le chemin pour les atteindre.
  • Sont plus motivées pour changer et s’améliorer à partir de leurs – inévitables – erreurs. Car elles acceptent mieux de regarder celles-ci, ce qui les aide à en apprendre quelque chose et à améliorer ce qui doit l’être.

En outre, la pratique de l’autocompassion conduit à une meilleure santé mentale, avec moins de risques de dépression et d’anxiété d’après une méta-analyse sur 14 études différentes, ainsi qu’une plus grande résilience dans les situations de stress traumatique.

Enfin, l’autocompassion, loin d’être une forme de faiblesse, nécessite beaucoup de courage et de volonté, indispensables pour regarder en face nos souffrances et nos difficultés et non les fuir dans des activités diverses ou la consommation de substances variées.

L’autocompassion est souvent confondue avec l’estime de soi, car les deux conduisent à un regard plus positif sur soi. Mais l’estime de soi implique de s’évaluer positivement, ce qui nous conduit le plus souvent à nous comparer aux autres en cherchant à nous sentir meilleurs. Elle est donc liée à nos réussites, ce qui nous rend plus dépendants des circonstances extérieures et elle est fréquemment associée au narcissisme et à la rigidité psychologique. L’autocompassion est une attitude plus stable car elle n’implique pas de comparaison et elle est moins dépendante du contexte dans lequel nous vivons et des résultats de nos actions.

Concrètement, comment faire ?

D’abord savoir que même si vous êtes la personne la plus dure au monde envers vous, vous pouvez progresser : le niveau d’autocompassion augmente en moyenne de 43% avec le programme MSC (Mindful Self-Compassion, l’autocompassion en pleine conscience) créé par Kristin Neff et Christopher Germer.

Cette mise en pratique est, en elle-même, une occasion d’expérimenter l’autocompassion. En effet, à un moment ou à un autre, vous allez nécessairement retomber dans le jugement envers vous-même, ne serait-ce que parce que vous aurez le sentiment de ne pas progresser assez rapidement. Ne rajoutez pas un niveau supplémentaire de condamnation en vous disant que vous ne devriez pas le faire. Au contraire, profitez-en pour accueillir avec douceur cette expérience de jugement, savoir que cela manifeste votre caractère profondément humain et vous inviter avec bienveillance à persévérer malgré ces pensées.

Sachez aussi que vous vivrez très probablement l’expérience que Kristin Neff et Christopher Germer appellent le retour de flamme : parce que votre bienveillance envers vous-même fera tomber des barrières intérieures, le souvenir d’expériences douloureuses remontera à la surface et vous fera revivre la souffrance que vous aviez enfouie. Sachez que c’est le signe que le processus de guérison s’est mis en route et, là aussi, saisissez cette occasion pour vous donner de l’autocompassion.

Il existe de très nombreux outils permettant de développer notre autocompassion. Vous en trouverez, par exemple, dans le livre de Kristin Neff et Christopher Germer « Mon cahier d’autocompassion en pleine conscience » (2020 Editions De Boeck supérieur), ou dans celui de Claire Mizzi et Céline Tran « Votre meilleur ami c’est vous » (2019 Editions J’ai Lu), qui donnent tous les deux également accès à des séances de méditation guidées en audio.

A titre d’illustration, voici quelques exemples de pratiques d’autocompassion :

  • Kristin Neff propose le mantra suivant, que vous pouvez utiliser dans chaque moment difficile de votre vie : « C’est un moment de souffrance. La souffrance fait partie de la vie.Que je sois bienveillant avec moi-même. » Ce mantra reprend de manière très synthétique les trois composantes de l’autocompassion :
    • « C’est un moment de souffrance » : s’ouvrir à l’expérience douloureuse sans s’identifier à elle ni penser qu’elle durera indéfiniment.
    • « La souffrance fait partie de la vie » : se souvenir que nous ne sommes pas seul à la ressentir développe la conscience de notre lien avec les autres êtres humains et de notre humanité commune.
    • « Que je sois bienveillant avec moi-même » : vouloir être bienveillant envers nous-mêmes.

Bien sûr, vous pouvez créer votre propre mantra avec les mots qui vous parleront le mieux pour exprimer les trois composantes de l’autocompassion.

  • Imaginez que c’est votre meilleur ami qui se trouve dans votre situation : que penseriez-vous ? Que lui diriez-vous ? Que feriez-vous ? Puis revenez à vous et voyez ce que vous pouvez vous dire et faire qui ressemblerait à cela.
  • Pratiquez la respiration affectueuse, créée par Kristin Neff et Christopher Germer pour le programme MSC, qui permet de se laisser apaiser, réconforter et soutenir par le rythme naturel de notre respiration.

Singing in the rain

« Quand il pleut, tu peux te désespérer de ne pas pouvoir sortir ou bien tu peux apprendre à danser sous la pluie ». C’est peut-être à cette phrase que pensait l’auteur de l’acronyme Rain (Reconnaissance, Acceptation, Investigation et Non-identification), qui fait écho à l’attitude d’autocompassion et que vous pouvez également pratiquer au quotidien :

  • Reconnaitre ce que nous vivons, y compris nos difficultés et nos blocages, est la base indispensable : si nous nions nos émotions et nos besoins, nous augmentons notre souffrance.
  • Accepter ce qui est, pour nous détendre et nous ouvrir à ce qui se présente à chaque moment de notre vie. Accepter n’est pas se résigner, c’est au contraire la première étape pour travailler à changer ce qui peut l’être.
  • Investiguer, pour voir en profondeur ce qui se passe dans trois directions : notre corps, nos émotions et nos pensées. Être attentif à ces trois dimensions dans une situation donnée nous permet de nous en dégager, d’être plus libre par rapport à ce que nous sentons, ressentons et pensons.
  • Ne pas s’identifier : nous cessons de considérer l’expérience comme étant « moi ». Je ne suis pas ma souffrance, je ressens de la souffrance. La distinction peut paraitre artificielle, mais elle ouvre un chemin de liberté : nous comprenons que nous ne sommes pas réellement cette identité affectée par l’expérience que nous vivons et nous pouvons alors nous en défusionner et demeurer dans la conscience de ce que nous sommes en profondeur.

Et si, en 2022, vous décidiez de devenir un bon ami pour vous-même ?

Pour aller plus loin :

Cet article m’a été inspiré par une excellente formation animée par Joran Farnier, psychologue clinicien et formateur, et vous pouvez retrouver ici son article très complet sur ce même thème.

Outre les livres de Kristin Neff et Christopher Germer, vous trouverez également de très nombreuses ressources sur l’autocompassion et la pleine conscience, ainsi que des propositions pour suivre le programme MSC sur le site pleinement conscient.e.

Ces pensées « négatives » qui nous veulent du bien

Je ne sais pas pour vous, mais pour ma part chaque fois que je fais quelque chose de nouveau et d’un peu difficile, je suis envahi par des pensées négatives sur le thème : « n’essaie même pas, tu n’y arriveras pas, tu n’en es pas capable ». C’est très désagréable et cela ne m’aide pas à me mettre en action … 

Pendant très longtemps j’ai regardé ces pensées comme « négatives », comme étant des pensées pathologiques issues de mon éducation et des expériences douloureuses de ma vie. Du coup cela rajoutait une couche de regard négatif sur moi : j’ai vraiment un problème puisque je subis toutes ces pensées négatives. C’est sûrement parce que j’ai été malheureux dans mon enfance, que je suis mal dans ma peau, que je devrais me faire soigner, etc, etc, etc.

En plus, j’imaginais que vous, les gens bien dans leur peau, vous n’aviez pas ce genre de pensées. Bon, parfois, quand vous vous sentez suffisamment en confiance avec moi et que vous me dites que vous aussi vous avez votre dose de messages intérieurs négatifs, je me sens moins seul, mais cela ne résout pas mon problème. 

Aujourd’hui je vois ces pensées différemment : c’est une part de moi qui veut me protéger, qui veut m’éviter les difficultés et la souffrance liées à l’échec. C’est sûr que la meilleure façon de ne pas échouer c’est de ne pas essayer quelque chose de nouveau. En réalité, ça part d’une bonne intention ce mouvement, c’est très bienveillant. 

Pour moi, cela change tout : je n’ai pas à faire à une partie malveillante et/ou malade de moi, c’est au contraire une partie tout à fait saine et bienveillante, qui veut m’éviter de souffrir. Cela me permet de l’accueillir paisiblement, d’entendre ce qu’elle me dit, de corriger certaines choses si nécessaires, de mieux me préparer si besoin, puis de lui parler tranquillement.

Par exemple, si c’est la peur de me lancer dans une nouvelle activité, une nouvelle relation ou un projet un peu fou qui se manifeste, je peux lui dire : « je te remercie de ton souci pour moi, de ton envie de me protéger, et en même temps j’ai vraiment envie de le faire, car cela répond à un besoin important pour moi et je pense que cela me rendra heureux au moins d’essayer. D’ailleurs, tu vois que j’ai pris toutes les précautions et fait ce qu’il faut pour mettre toutes les chances de mon côté.  Je vais donc y aller et je sais que tu seras là pour me prévenir s’il arrive un danger que je n’avais pas prévu. »

C’est pareil pour les pensées d’insatisfaction sur moi et mes actions : c’est la part de moi qui as très envie d’être aimée et qui pense que je ne le serai que si je suis parfait. Du coup elle est très inquiète quand elle a l’impression que je ne me comporte pas comme le garçon parfait dont elle rêve et elle m’envoie plein de reproches et autres messages désagréables en pensant que cela va me stimuler pour faire mieux et m’approcher de la perfection qu’elle recherche. C’est très gentil, très protecteur et cela part d’un très bon sentiment : vouloir que je sois aimé. Bon, c’est sûr que ça ne m’aide pas à m’aimer moi-même, mais ça elle ne s’en rend pas compte, trop obnubilée par la peur que les autres ne m’aiment pas … 

Je ne sais toujours pas pour vous, mais pour moi cela me fait beaucoup de bien de ne plus me sentir en lutte avec moi-même, de savoir que mes différentes parts intérieures veulent toutes mon bien, même si elles se trompent parfois sur la manière d’y parvenir. 

Et bien sûr la part de moi qui a peur que vous n’aimiez pas mon texte me dit que je ferais mieux de ne pas le publier. Comme vous pouvez le voir, je l’ai gentiment remercié et je ne l’ai pas écouté. 

Quelques outils pour entretenir votre bonne humeur

Extraits du livre « Tout déprimé est un bien portant qui s’ignore » de Michel Lejoyeux.

Précision importante : je parle ici de la « simple » déprime, pas de la dépression, qui est une maladie et nécessite une intervention thérapeutique. 

L’idée principale est que votre bonne humeur s’entretient et que, si vous le faites, elle progressera de jour en jour. C’est ce que montrent toutes les études de psychologie positive.

Points à garder en mémoire lorsque vous ne vous sentez pas bien : 

  • l’avenir : savoir que cet état ne durera pas toujours ;
  • le passé : vous avez déjà connu cet état et vous vous en êtes sorti ;
  • le présent : s’entrainer à plus investir le présent, à mieux en profiter, permet de découvrir des plaisirs qu’on ne voyait plus ; 

Nous pouvons être très affectés par une ambiance collective négative. Il est important de savoir s’en protéger. Cela passe, notamment, par : 

  • limiter au strict nécessaire son temps d’exposition aux informations ; 
  • ne pas trop faire durer les débats déprimants et souvent inutiles ; 
  • s’engager pour une cause : les évènements sur lesquels nous tentons d’agir sont moins déprimants car nous nous sentons moins impuissants ;

Nous sommes plus heureux quand nous utilisons à parts équilibrées nos deux cerveaux : si nous sommes trop rationnels et analytiques, il faut développer notre côté intuitif, spontané, relationnel, et inversement. Il faut donc de l’équilibre et de la variété dans notre vie. Il faut aussi une part de nouveauté car cela fait travailler les deux cerveaux ensemble pour trouver un nouvel équilibre. 

Côté physique, le sport raisonnable (pas celui qui épuise) aide à lutter contre la déprime et contre de nombreuses maladies. Pour obtenir un effet optimal, prévoyez des séances d’au moins 45 minutes trois fois par semaine. 

Il aide, pour être heureux, d’éviter : 

  • les pensées globalisantes : « je suis un raté », au profit de la nuance et des contrastes : « je suis très bon dans certains domaines, bon dans d’autres et non connaisseur dans d’autres ». 
  • les raisonnements invariants : « j’ai toujours été comme ça et je ne changerai pas », ou bien « telle personne sera toujours comme cela », au profit de la souplesse : je et les autres peuvent changer, évoluer.
  • les approches irréversibles : « je ne m’en sortirai jamais », au profit de l’adaptation et de la réversibilité : « je peux apprendre et progresser quel que soit ma condition et mon âge ».

Quelques bonnes questions à se poser pour sortir de ce type de raisonnements : 

  • suis-je vraiment le seul responsable de ce que je me reproche le plus ? 
  • lorsque j’ai échoué, quel était ma part de responsabilité et celle d’autres facteurs ? 
  • suis-je aussi seul et incompris que je le crois ? 
  • dois-je faire confiance à mes voix intérieures négatives ? 

Nous sommes, pour la plupart, trop sérieux et trop raisonnables. Il faut cultiver notre part de folie, même sur de petites choses. Quelques questions à se poser pour aider à cela : 

  • dans quel domaine appréciez-vous le plus de prendre des risques ? trouvez le et lancez-vous ; 
  • quel est le domaine ou la situation de votre vie qui vous mobilise le plus ? allez-y à fond, sans oublier de conserver un équilibre entre les différents aspects de votre vie ; 
  • quand vous êtes-vous étonnés pour la dernière fois ? recommencez ! 
  • quand vous êtes-vous fait un peu peur à force d’être enthousiaste ?  continuez à oser !

Développez votre estime de vous : faites la liste de vos capacités, de vos réussites, de vos qualités. Si vous n’en trouvez pas, demandez à vos proches ! Relisez régulièrement cette liste et voyez comment et à quelles occasions vous avez mis en œuvre ces qualités dans les derniers temps.

Six croyances qui font du bien et qu’il est utile de relire régulièrement : 

  • pour être heureux je ne suis pas obligé de réussir tout ce que j’entreprends ; 
  • pour être heureux, j’ai besoin d’amis et de proches, mais je ne pourrai pas être aimé de tout le monde tout le temps ; 
  • ma valeur personnelle ne dépend pas de ce que les autres pensent de moi ; 
  • celles et ceux qui ne sont pas d’accord avec moi ne me détestent pas forcément ; 
  • si je fais une erreur cela ne veut pas dire que je suis nul, et même si j’en fais plusieurs … 
  • j’ai besoin de l’homme ou de la femme de ma vie mais je dois pouvoir vivre sans lui ou elle ; idem pour mon travail ;

La gratitude est une émotion très puissante pour aller bien. Pour la développer, vous pouvez, par exemple, noter chaque soir 3 moments de votre journée dans lesquels vous vous êtes sentis joyeux, en paix, satisfait, etc. Relisez régulièrement ce que vous avez noté, cela vous aidera à prendre conscience de tout ce qui est bon pour vous dans votre vie. 

Vous pouvez aussi écrire des lettres de remerciements à des personnes qui vous ont fait du bien. Vous pouvez leur envoyer, aller les voir pour la leur lire ou la garder pour vous … En tout cas cela vous aidera à vous focaliser sur les personnes qui ont été positives pour vous et cela contribue au bonheur. Si vous vivez en couple, votre partenaire peut être la ou le destinataire de votre première lettre. Vous pouvez commencer, par exemple, par lui dire les trois plus belles choses que vous lui devez.